Les aiguilles, loin des bottes de foin

Les observateurs les plus impartiaux ne sont sans doute pas les fabricants de tendances, toujours prompts à amplifier le succès des modes qu’ils tentent de lancer... Pourtant, lorsque l’on voit se développer, en marge des démonstrations de la jet-set internationale, 300 clubs français de broderie, 400 de patchwork et davantage encore de sites Internet dédiés, on ne s’étonne plus de l’accueil - confirmé pour la quatrième année consécutive – que connaît le salon « L’aiguille en fête ».

Pour Jean-Charles Durand, l’inventeur du salon (qui a attiré près de 30.000 visiteurs au Parc Floral de Vincennes début mars), pas de mystère : le retour en grâce spectaculaire des aiguilles est avant tout dû à la volonté de « devenir son propre créateur, le porte-drapeau de ce qu’on a fait soi-même ».

Il est vrai qu’au-delà de la démarche purement utilitaire qui prévalait il y a quelques décennies, c’est bien la dimension artistique des travaux d’aiguille qui s’exprime aujourd’hui sans honte et dans tous les domaines. Ainsi, certains philatélistes ont ajouté à leur dévorante passion celle de « l’art postal textile » permettant d’associer la valeur d’un timbre rare au caractère unique d’un objet - une enveloppe par exemple - réalisé en broderie.

Knit branchouille ou tricot franchouille ?

Les  créatrices et créateurs de bijoux amateurs ne sont pas en reste. Les bracelets, les colliers et les bagues réalisés au point de croix et portés désormais par les « people » les plus en vue, s’inspirent parfois de façon éhontée de modèles simplement récupérés sur Internet !

Loin de la « knit party » (réunion tricot) branchée et du « Knit Café » new-yorkais, les Françaises ont la possibilité de se former au maniement des aiguilles, pour presque rien dans les nombreux clubs qui se sont créés un peu partout au cours de ces dernières années.

Avec beaucoup plus d’ambition  - et de moyens financiers, disons-le - on peut également bénéficier d’une véritable formation en assistant à une session de l’école de broderie d’art Lesage, installée à Paris sur le lieu même des prestigieux ateliers (budget minimum, 1 200 euros…).

A l’instar de la plupart des activités manuelles, les « travaux d’aiguille » (comme on disait jadis), sont un efficace « déstressant » (comme on dit aujourd’hui). La petite touche artistique qu’on peut y mettre grâce à son talent personnel et aux nouveaux matériaux apparus sur le marché est un atout incontestable.

Le maniement des aiguilles et du crochet n’a pas de sexe et les hommes sont, paraît-il, de plus en plus souvent les bienvenus dans les clubs et les salons.

L’exception confirmant la règle, la virtuosité tricotée, brodée ou crochetée reste cependant encore très majoritairement conjuguée au féminin. Comme il ne s’agit probablement pas de l’enjeu le plus sensible dans le vaste débat sur la parité hommes/femmes, on peut sereinement le confirmer sans avoir à le déplorer.

Alors, Mesdames, à vous de continuer à jouer : les sommets de la mode sont encore à portée de votre main…

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