1 virus découvert pour 100 existants
Depuis, les techniques d’analyses biologiques et moléculaires ont permis d’immenses progrès dans le domaine de la surveillance et du diagnostic. Des progrès qui donnent parfois le vertige. Entre la conclusion des travaux de Louis Pasteur sur la rage en 1885 et 1986, soit un siècle, les biologistes avaient identifié et décrit 1 700 virus. Moins de 20 ans plus tard, en 2004, le Comité international de taxonomie des virus en recensait… 6 247 ! Et l’on estime aujourd’hui que ce nombre n’équivaut peut-être qu’à 1% de l’ensemble.
Les inquiets qui pensent voir apparaître un virus nouveau à chaque journal télévisé, sont donc sans doute encore bien loin du compte…
Même si, de toute évidence, la « virosphère » reste largement à explorer, on a cependant engrangé quelques certitudes, parmi lesquelles celle qu’il ne faut pas confondre virus émergent et virus… émergent.
Les spécialistes de la virologie font ainsi la part des virus découverts grâce à une « émergence de connaissance » dans le secteur de la biologie, et les virus « véritablement émergents » comme le sont celui du sida ou des fièvres hémorragiques. Comme le sont aussi ceux des épidémies de grippes, qu’elles soient saisonnières ou pas…
Mutants ou nouveaux ?
Le vocabulaire est parfois plus trompeur encore en virologie que dans d’autres domaines. Si aucun virus ne peut être généré spontanément (il n’y a pas à proprement parler de « nouveau » virus), on parle cependant de virus « d’évolution nouvelle » qui par mutations ou recombinaisons entre des virus existants peuvent engendrer des souches plus virulentes. Il suffit parfois que les conditions dans lesquelles ils ont existé pendant des millions d’années soient modifiées et perturbent les écosystèmes, favorisant la transmission de l’animal à l’homme puis de la transmission d’homme à homme.
Quelles que soient les précautions de vocabulaire, les faits sont là : au cours des trois dernières décennies, trente-cinq nouvelles maladies, dites « émergentes », ont été recensées. Vingt-six sont d’origine virale et, si elles ne sont pas toutes des tueurs en série potentiels, il est au moins prudent de chercher à s’en prémunir.
Grippe H1N1 : premier dilemme vaccinal du siècle
La vaccination demeure la solution la plus sure et la plus efficace… à condition évidemment d’avoir les moyens et le temps de la développer. C’est très précisément la difficulté à laquelle se sont heurté les autorités avec la grippe A (H1N1).
Attendre avant de fabriquer le vaccin, c’était prendre le risque de ne pouvoir l’administrer massivement qu’à partir d’avril 2010, donc d’arriver largement après la bataille décisive.
Précipiter sa production, c’était prendre le risque de tout miser sur un vaccin peu efficace, voire inadapté à la situation. Enfin, mobiliser toutes les capacités de l’industrie pharmaceutique sur la fabrication du vaccin contre la grippe H1N1, c’était parier, non seulement sur la pandémie mais aussi sur la gravité de l’incidence du virus.
Pas facile la santé publique ! Rarement en tout cas la vaccination n’aura été placée au cœur d’une situation où chaque choix aurait dû être passé au crible d’une grille bénéfice / risque à – très - forts enjeux.